
L’éducation physique – Éditions Pow Pow
Laura a un an pour écrire un nouveau livre. Elle doit se rendre au gym tous les jours de la semaine. La maison de ses grands-parents doit être vidée et nettoyée. Les assiettes cassées doivent être jetées à la poubelle. Des étirements doivent être faits après chaque séance d’entraînement. Sa mère doit trouver une manière d’accrocher une peinture au mur. Est-ce qu’un livre doit vraiment avoir une intrigue? Un livre a besoin d’un thème. Ça ne sert à rien de souhaiter la bonne année passé la mi-janvier. Un livre doit être écrit et le monde a besoin de plus de maisons à la campagne.
L’éducation physique une bande dessinée audacieuse qui explore les dynamiques de pouvoir et les traumatismes liés au corps dans le contexte scolaire. Publié aux Éditions Pow Pow dans une traduction d’Alexandre Fontaine Rousseau, cet ouvrage se distingue par son approche sans compromis des violences psychologiques et physiques vécues durant l’enfance.
Mosi déploie un trait nerveux et expressif qui amplifie la tension narrative. Son style graphique, à la fois cru et poétique, traduit avec justesse l’inconfort et la vulnérabilité des jeunes corps soumis aux regards et aux jugements. La structure fragmentée du récit mime la mémoire traumatique, alternant entre passé et présent pour dresser un portrait saisissant de l’impact durable des humiliations scolaires.
L’autrice ne se contente pas de dénoncer : elle interroge les mécanismes institutionnels qui normalisent certaines formes de violence. Le cours d’éducation physique devient métaphore d’un système qui discipline les corps et formate les identités. La traduction de Fontaine Rousseau préserve la force du propos tout en l’adaptant avec sensibilité au contexte québécois.
Œuvre nécessaire et dérangeante, L’éducation physique s’inscrit dans une veine autobiographique courageuse. Mosi signe ici un récit cathartique qui résonnera auprès de quiconque a vécu l’aliénation corporelle durant l’adolescence.
ISBN 978-2-925114-50-5
Date de parution 18 Nov 2025
Pages 180
Langue Français
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Makalu – Esther Bordet
En 1954, le grand-oncle d’Esther Bordet, Pierre, était sélectionné pour accompagner les premières expéditions françaises au Makalu en tant que géologue cartographe. Cette montagne, la cinquième plus haute du monde, est située dans la chaine himalayenne au Népal. Tandis que les alpinistes atteignaient le sommet, Pierre cartographiait les strates géologiques d’une région jamais étudiée. Ces deux voyages au Makalu initièrent la poursuite de recherches géologiques pendant une vingtaine d’années. Le journal de Pierre Bordet fait partie de l’héritage familial d’Esther. Ces archives, ainsi que son propre voyage au Makalu, ont inspiré le premier projet de bande dessinée d’esther : Makalu.
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Bande dessinée contemplative qui conjugue récit d’ascension et introspection personnelle. Publié chez Moëlle Graphik, cet ouvrage suit une alpiniste confrontée aux défis du huitième plus haut sommet du monde, mais surtout à ses propres limites intérieures.
Bordet déploie un dessin épuré aux lignes délicates qui contraste avec la rudesse de l’environnement himalayen. Ses planches, souvent dominées par de vastes espaces blancs, évoquent autant l’immensité glaciale que le vide existentiel. La couleur, utilisée avec parcimonie, ponctue les moments d’émotion ou de révélation.
Le récit évite les pièges du genre en refusant l’héroïsme gratuit. L’autrice explore plutôt la quête de dépassement comme moyen de confronter le deuil et la perte. Les dialogues minimalistes laissent place au silence et à l’observation, créant une atmosphère méditative.
Makalu est une œuvre sensible sur la fragilité humaine face à la nature et à soi-même, portée par une esthétique raffinée.
https://moellegraphik.ca/catalogue-bande-dessinees/p/makalu
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Dead Cities -Récits d’un temps de catastrophe
Mike Davis
Le monde occidental est à la fois habité par un sentiment de toute-puissance et hanté par sa disparition. Étrangement, les apocalypses que met en scène la culture populaire, par exemple sous la forme de l’invasion étrangère ou extraterrestre, occultent le fait qu’il est d’abord menacé de l’intérieur, par son propre mode de fonctionnement : étalement urbain, surexploitation des ressources naturelles, utilisation massive de combustibles fossiles et de substances polluantes dont on entrevoit tout juste l’étendue des conséquences, déploiement d’une puissance de feu inouïe, soi-disant au service du bien et de la démocratie… Les récits contenus dans cet ouvrage révèlent qu’il faut cesser d’envisager la catastrophe comme un accident ou une exception. La multiplication des événements climatiques extrêmes, entre autres choses, nous le rappelle, il s’agit d’un état normal et permanent. Mike Davis a parfaitement vu que l’histoire humaine était encastrée dans l’histoire de la nature. Ici au sommet de son art prophétique, il nous raconte une humanité vouée à sa perte mais qui possède aussi les moyens de changer son destin.
Dead Cities : Récits d’un temps de catastrophe de Mike Davis est un essai visionnaire qui ausculte les métropoles contemporaines à travers le prisme de l’effondrement. Publié au début des années 2000, cet ouvrage demeure d’une actualité troublante alors que crises climatiques et inégalités urbaines s’intensifient.
Davis, sociologue et penseur radical, analyse les villes comme des poudrières où convergent catastrophes naturelles, terrorisme, pandémies et ségrégation sociale. De Los Angeles à Lagos, il cartographie les vulnérabilités structurelles du capitalisme urbain et démontre comment les désastres frappent d’abord les plus démunis. Son écriture incisive mêle données empiriques, critique politique et récits apocalyptiques avec une érudition impressionnante.
L’auteur ne se contente pas d’un constat alarmiste : il dénonce les logiques sécuritaires qui transforment les métropoles en forteresses, creusant davantage les fractures sociales. Dead Cities s’impose comme une lecture essentielle pour comprendre la géographie de l’injustice contemporaine et les mécanismes qui condamnent certaines populations à vivre dans des zones de mort anticipée. Un ouvrage prophétique et indispensable.
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PARMI LES FEMMES – AIMÉE LÉVESQUE
Parmi les femmes se présente comme un livre-mausolée en hommage à vingt-huit femmes négligées par l’Histoire : femmes de, muses de, filles de, artistes, œuvres d’elles-mêmes, résistantes, citoyennes engagées dont les destins ont sillonné les routes de l’ancien Empire austro-hongrois sur lesquelles Aimée Lévesque a vagabondé. De Nora Barnacle, l’épouse de James Joyce, à Zdeňka Hejduková, jeune Tchèque tuée par les nazis pour une raison inconnue, en passant par Inela Nogić, élue Miss Sarajevo dans la ville assiégée en 1993, ce monument littéraire en forme de journal de voyage offre une histoire féminine et personnelle de l’Europe centrale et des Balkans. Résultat d’un colossal travail de fouille sur plusieurs années en différentes langues, le texte d’Aimée Lévesque alterne entre prose et vers libres, proposant de faire de l’Histoire un dialogue, dans lequel quête documentaire, recherche de terrain et poésie se soutiennent et se nourrissent
Parmi les femmes : De Prague à Sarajevo d’Aimée Lévesque, publié aux éditions La Peuplade, se présente comme un livre-mausolée rendant hommage à vingt-huit femmes oubliées par l’Histoire. De Nora Barnacle à Inela Nogić, élue Miss Sarajevo durant le siège de 1993, l’autrice explore les destins de femmes ayant parcouru les routes de l’ancien Empire austro-hongrois.
Lévesque tisse son récit à partir d’archives, de journaux et de photographies, fruit d’un colossal travail de recherche mené sur plusieurs années en différentes langues. Le texte alterne entre prose et vers libres, proposant de faire de l’Histoire un dialogue où quête documentaire et poésie se nourrissent mutuellement.
Cette odyssée mêle journal de voyage et récit historique, créant un dialogue avec chacune de ces femmes tout en intégrant la propre aventure de l’autrice. L’œuvre transcende les barrières du temps pour renouer avec des figures féminines marginalisées, démontrant une maturité d’écriture remarquable. Monument littéraire complexe et généreux.
