Dancing after TEN est un voyage inspirant à travers l’expérience éprouvante d’une femme tentant de retrouver une vie normale après qu’un syndrome rarissime l’ait laissée aveugle.
À la fin de l’année 2004, la vie de Vivian Chong bascula du jour au lendemain quand on lui diagnostiqua avec le syndrome TEN (Toxic Epidermal Necrolysis, en français la »nécrose des tissus épidermaux), syndrome qui attaque les tissus dont ceux de la cornée. À l’aube de cette expérience traumatisante, Chong fut forcée d’apprendre à vivre avec un handicap dans un monde qui ne prend que rarement en compte les personnes vivant avec un handicap. Non seulement elle aura survécu, mais se sera également épanouie, ce qui lui aura permis de se forger une nouvelle identité en découvrant le monde sous un tout nouvel angle.
Dans »Dancing after TEN », Chong se joint au talent de la dessinatrice Georgia Webber – qui fut d’ailleurs l’autrice de son propre roman graphique autobiographique à propos de son handicap à elle (handicap de la voix) – pour raconter cette histoire de noirceur et l’amener à la lumière du jour. Dans un style proche du croquis, utilisant des teintes bichromatiques, Webber permet de bien ressentir les fortes sensations d’angoisse et de peur vécues par Chong. Les dessins, au début assez sommaires et brouillons et devenant de plus en plus chaotiques au fur et à mesure que la protagoniste se bat contre le syndrome, finissent par devenir progressivement précis et détaillés. L’évolution nous permet non seulement de visualiser, mais aussi de ressentir intérieurement le combat mené par Chong. Ayant été longtemps complètement aveugle, puis ayant retrouvé la vue pendant un court laps de temps après une opération, Vivian Chong se voit aujourd’hui malgré tout obligée de vivre avec un handicap visuel très prononcé.
Tout commence alors que Chong, dans la vingtaine, travaille comme graphiste 3D. À la suite d’une commotion cérébrale déclenchée par la chute d’une branche lui atterrissant sur la tête, Chong ingère des pilules d’ibuprofènes donnée par son partenaire de l’époque. Rapidement, des symptômes anormaux voient le jour et l’envahissent (démangeaisons, vomissements). Son état de santé s’aggrave de jour en jour, et elle se retrouve à l’hopital. Au fur et à mesure que Chong sombre dans les effets du syndrome et voit ses tissus se déchirer, son entourage semble en faire de même. Son copain ne répond plus à ses message ni à ses appels, et sa famille proche est au Viêt Nam dans l’impossibilité de lui porter secours. Vivian perd rapidement la vue et se retrouve complètement seule, dans la noirceur et dans sa vie, abandonnée par son cercle social.
C’est un calvaire qui durera des mois et dans lequel Chong fera preuve d’une immense résilience. La lecture en fait presque mal tellement on voit la protagoniste être abandonnée par ses proches au moment où elle a le plus besoin d’eux. Elle se voit octroyer une aide à domicile qui semble malheureusement peu conciliante et tolérante, voire parfois carrément déplacée dans ses actions et paroles. Isolée et affaiblie, Chong arrive quand même à rester positive. Même si les progrès sont lents et les rechutes fréquentes, elle tient bon malgré tout.
Il faudra plusieurs années à Vivan Chong pour être capable d’apprivoiser sa nouvelle vie et son nouvel handicap. Elle bénéficiera de l’aide d’un chien pour personnes non-voyantes et apprendra le braille. »Dancing after TEN » nous permet de découvrir une tranche de réalité rarement accessible à la majorité des gens : comment réapprend-t-on à vivre sans l’un de nos sens les plus utilisés dans la vie ? Quels sont les techniques pour y arriver ? À la fois instructif et touchant, le roman graphique nous laisse avec une touche d’espoir. C’est finalement à travers les arts (la danse, l’humour et le dessin, notamment) que Vivian Chong se ré-appropriera sa vie à sa manière.
Paru simultanément avec les débuts de Chong à Toronto dans sa production de danse-théâtre »Dancing with the Universe », ce roman graphique est une histoire inspirante sur la résilience.
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Dancing after TEN – Éditions Fantagraphics
Pages: 168
Dimensions: 10″ x 8.25″
ISBN-13: 978-1-68396-316-5
Année: 2020