Partant d’une histoire authentique, le livre retrace le parcours d’une victime du monde du travail. Après une longue enquête, les auteurs racontent, dans une fiction, comment un système de harcèlement est mis en place, à tous les niveaux de la hiérarchie, afin de pousser les employés au maximum de leurs capacités… un système qui les poussent, parfois, à l’irréparable. Un grand récit-enquête sur le mal être au travail.

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Jeune ingénieur, Carlos Pérez se fait embaucher en 1988 par une grande marque automobile. Son rêve d’enfant se réalise. Il monte peu à peu les échelons, se marie, attend un premier enfant… Sa vie se complique dès lors que la société emménage dans un nouveau lieu, à l’opposé de la banlieue où il vient d’emménager. Une nouvelle génération de cadres arrive avec la nouvelle direction et la machine à broyer se met en marche. On l’envoie suivre le travail d’une usine en Argentine, pour mieux confier la suite de sa mission à un autre cadre. Lui, devra aller en Roumanie, abandonnant provisoirement femme et enfants. Les réunions inutiles se chevauchent, sa hiérarchie devient humiliante, inhumaine. À bout, harcelé moralement, Carlos va commettre l’irréparable.

Livre percutant, entre le récit et le documentaire, Le travail m’a tué est une belle découverte qui explore les relations de pouvoir dans le monde du travail, en France. Bien évidemment, la situation est sensiblement partout la même (sur-embauche, sur-qualification, sous-qualification, des cadres qui jouent avec les employé.es comme s’ielles jouaient à la bourse avec les économies des autres, re-localisation dans des pays où la main d’oeuvre est bon marché (entendre ici, sous-payée)…). Le récit permet de plonger à l’intérieur de l’enfer de cette machine à broyer notamment parce que l’on s’attache dès le début au personnage en ayant accès à certains moments de son enfance, adolescence et vie d’adulte, de sa vie amoureuse et de ses premiers succès dans l’industrie. C’est somme toute le genre de parcours que l’on cherche à avoir, tout en étant supporté par ses proches. On cherche à ce que notre vie ait un minimum de sens alors que l’on consacrera près du 3/4 de celle-ci à l’emploi – autant en choisir un qui nous plaira (si on en a la chance), pour autant que celui-ci ne nous pousse pas à la dépression, ou encore à se faire congédier à quelques années de la retraite, condamné.es à prendre tout ce qui nous tombera sous la main pour finir sa  »carrière » avec un minimum de dignité.

L’industrie contemporaine du travail, sous ses airs progressiste où la soif de rendement des actionnaires est camouflée par des reconfigurations épurées et vendues comme étant synonyme de simplification de la vie des employés, est un véritable cheval de troie sur nos existences. Dans ce récit, Carlos Pérez représente le protagoniste que l’on retrouvait à l’époque dans les tragédies grecques, celle de l’humain ordinaire qui se retrouve pris dans un engrenage-sable mouvant. Il nous sert de réceptacle pour mieux comprendre comment les rapports humains, pourtant à la base de toute société digne de ce nom, finissent par agir comme un poison sur notre existence. Le livre de Prolongeau, Delalande et Mardon accentue encore plus l’impact affectif du livre en jouant avec les teintes de couleurs selon les situations qui se déroulent dans le livre.

Simple, efficace, touchant et troublant, Le travail m’a tué est une brillante analyse du monde de l’industrie de l’automobile (et du monde du travail).

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Un récit de Hubert Prolongeau et Arnaud Delalande. Dessin de Grégory Mardon.

Première parution : 05/06/2019

195 x 265 mm

120 pages

Prix de vente : 19 €

Code Sodis : F00086

ISBN : 9782754824682

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